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07/06/2023
Risque pays et études économiques

Illusions perdues et grandes espérances, dans le Baromètre Risques Pays et Sectoriels de Coface du T2 2023

Illusions perdues et grandes espérances, dans le Baromètre Risques Pays et Sectoriels de Coface du T2 2023

Après un début en fanfare, 2023 ne devrait pas être l’année à laquelle les observateurs s’attendaient. La 1ère moitié de l’année a permis de renforcer certaines de nos convictions :

  • non, l’inflation ne reviendra pas spontanément et sans douleur à sa cible dans les pays développés (2 %),
  • non les banques centrales ne « pivoteront » pas d’ici la fin de l’année,
  • et non, la seule levée des restrictions sanitaires ne permettra pas à la Chine de jouer un rôle de moteur pour l’économie mondiale.

Deux éléments essentiels que le marché avait perdu de vue sont également revenus sur le devant de la scène:

  • l’accès à une énergie abondante et bon marché demeure central dans le fonctionnement du système économique mondial,
  • et la politique monétaire a plus d’effets directs sur la valorisation des actifs et la stabilité financière que sur les prix à la consommation.

Les perspectives économiques demeurent étroitement liées à l’évolution de l’inflation et à la réponse des banques centrales, et nos prévisions sujettes à de nombreux aléas baissiers, au 1er rang desquels figurent l’offre d’énergie et de crédit.

Dans ce contexte, Coface a procédé à 13 révisions à la hausse et 2 à la baisse pour ses évaluations pays ainsi qu’à 26 changements d’évaluations sectorielles (13 reclassements et 13 déclassements). Ces mouvements soulignent une amélioration des perspectives, mais un environnement qui demeure très exigeant et incertain.

 

Résilience confirmée pour l’économie mondiale, mais les perspectives restent ternes

Les chiffres de croissance du début d’année dans les principales économies ont confirmé que le spectre de la récession s’était éloigné pour l’instant (à l’exception de l’Allemagne). Plusieurs facteurs l’expliquent. D’abord l’Europe a su éviter la rupture de ses approvisionnements énergétiques. Ensuite, la résilience est venue d’unsursaut de la consommation en Amérique du Nord et en Chine. Enfin, les économies émergentes ont également confirmé leur bonne tenue. Tout cela nous a amené à revoir à la hausse notre prévision de croissance pour l’économie mondiale en 2023 qui s’établit désormais à 2,2%.

Ces différents éléments trouvent un prolongement dans nos évaluations pays avec 13 reclassements, ceux-ci concernant surtout des pays émergents[1]. 7 des 13 reclassements sectoriels concernent les transports, qui bénéficient de la reprise du tourisme et de l’apaisement des tensions sur les chaînes d’approvisionnement.

Les perspectives économiques demeurent néanmoins ternes pour 2023 et au-delà, en particulier dans les économies avancées. Nos prévisions – 2,3% de croissance pour 2024 - indiquent que la croissance mondiale ne devrait pas rebondir significativement. La quasi-stagnation de l’économie mondiale est en effet appelée à se prolonger, avec une persistance de la faiblesse aux Etats-Unis, une timide reprise européenne et une croissance chinoise en-deçà de ses standards d’avant-pandémie.

 

L’inflation baisse, mais n’est pas vaincue

Dans la liste des principaux risques pour les mois à venir, celui d’une inflation persistante occupe une place de choix. Le recul « mécanique » de l’inflation au 1er semestre s’est confirmé, les répercussions du conflit en Ukraine sur les prix de l’énergie s’estompant dans la plupart des économies. En revanche, les signaux d’une inflation plus durable se sont aussi confirmés avec une inflation sous-jacente stabilisée à des niveaux élevés en zone euro, au Royaume-Uni et aux Etats-Unis.

Un regain des tensions inflationnistes est par ailleurs toujours possible. La reprise chinoise n’a pas encore pris toute sa mesure et devrait exercer des pressions sur l’approvisionnement gazier. De son côté, le marché pétrolier est plus tendu après les annonces de réduction de production de l’OPEP+. L’organisation a ainsi retiré du marché l’équivalent de 3,7 % de la demande mondiale. Pour l’heure, nous maintenons notre prévision d'un prix autour de 90 USD/baril en moyenne annuelle.

Outre les prix de l’énergie, les matières premières agricoles sont également à surveiller. Alors que la baisse des derniers mois n’a pas nécessairement été répercutée sur les prix à la consommation, de nouveaux risques haussiers se dessinent déjà. Au-delà du conflit russo-ukrainien qui continuera d’exercer des pressions, le phénomène météorologique El Niño semble se profiler à partir de l’été 2023. Il pourrait influencer la production et les prix en 2023-24 avec des températures plus chaudes et des déficits hydriques dans certaines parties du monde.

 

Vers une raréfaction du crédit et une poursuite de l’augmentation des défaillances d’entreprises

Les effets sur l’inflation du resserrement monétaire passé sont encore largement attendus, particulièrement sur l’évolution des prix des services. Ceux-ci continuent de progresser avec des niveaux peu compatibles avec les cibles d’inflation à 2 %. Néanmoins, certaines des principales banques centrales ont décidé de faire une pause dans les hausses de taux, à commencer par la Banque du Canada, la Reserve Bank of Australia, et, probablement, la FED. A l’inverse, la Banque d’Angleterre devrait relever encore une fois son taux, et la BCE sera probablement contrainte de procéder à des hausses lors de ses prochaines réunions.

Les pauses dans les hausses de taux doivent permettre d’évaluer l’impact des actions effectuées depuis plus d’un an. En effet, les turbulences du secteur bancaire peuvent susciter des préoccupations quant à un resserrement du crédit, déjà perceptible. Le ralentissement des nouveaux prêts aux ménages et aux entreprises, qui tire à la baisse la demande, l’activité économique et donc in fine l’inflation, plaide également pour une attitude prudente de la part des banques centrales.

Les entreprises seront de fait confrontées dans les mois à venir à un environnement adverse de renchérissement et de durcissement des conditions d’octroi de crédit, tout en faisant face à une demande domestique atone. De plus, après avoir vu, dans l’ensemble, leurs marges progresser en 2022, les entreprises verront vraisemblablement leur profitabilité opérationnelle décliner sous les effets conjugués d’une baisse progressive de l’inflation sous-jacente et de la hausse des coûts salariaux unitaires. Aussi l’augmentation marquée des défaillances d’entreprises depuis le début de l’année dans la majorité des économies avancées devrait se poursuivre voire s’amplifier au cours des prochains mois.

 

Les économies émergentes continueront de tirer la croissance mondiale, mais des poches de vulnérabilité persistent

Si les économies avancées verront leur croissance diminuer en 2024, les pays émergents devraient accélérer, avec une croissance de 3,9 % soit leur plus forte expansion depuis 2018. Le principal facteur sera la reprise progressive de l’économie chinoise, qui profitera aux producteurs de matières premières. Le second facteur est la pause dans le cycle de resserrement monétaire de la Fed.

Coface procède de ce fait au reclassement de pays exportateurs d’énergie comme l’Arabie Saoudite, le Qatar, le Nigeria ou le Kazakhstan. En parallèle, la Malaisie et les Philippines, qui bénéficieront de l’afflux de touristes chinois, retrouvent leurs évaluations d’avant-pandémie. Il convient toutefois de souligner que le resserrement des conditions de financement au niveau mondial a plongé bon nombre de pays en risque de défaut de paiement. L’Egypte avait ainsi été déclassée en 2022, et le Ghana en février dernier. Dans cette même logique, nous procédons au déclassement ce trimestre du Kenya et de la Bolivie.

 

Retrouvez ici l’intégralité du baromètre Coface

[1] Malaisie, Philippines, Arabie saoudite, Qatar, Tanzanie, Niger, Nigéria, Cap-Vert, Bosnie-Herzégovine, Kazakhstan et Ouzbékistan

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